La Grande Guerre racontée par mes ancêtres

14 novembre 2025

Pendant la Première Guerre mondiale, lettres et cartes postales étaient bien plus que de simples messages. Elles étaient un véritable lien vital entre ceux partis au front et leurs familles restées à l’arrière. C’était une façon de tenir malgré l’éloignement, l’incertitude et l’angoisse. Dans ma famille, nous avons conservé de nombreuses correspondances de cette époque, notamment celles de mon ancêtre, Charles LOISELET parti au front. 

Des nouvelles du front

Pour les soldats, écrire à la famille était un rituel rassurant. Mais la censure limitait ce qu’ils pouvaient raconter. Très peu de détails sur les combats ou les conditions de vie apparaissaient dans leurs lettres. Dans les cartes de mon ancêtre, on trouvait surtout des phrases simples et affectueuses comme : « Je vous embrasse », « Je pense à vous » ou « Merci pour ta lettre de la dernière fois ».

Et pourtant, les dates et lieux d’envoi permettent aujourd’hui de suivre leurs parcours sur le front. Les cartes de Charles LOISELET montrent où il se trouvait à telle ou telle date, offrant un récit précis de son expérience. Dans une carte datée du 21 janvier 1916, on y apprend qu'il se trouve dans le secteur de Verdun. Et le 7 mars 1916, il se trouve à Châlons-sur-Saône. Le 11 mars 1916, il écrit depuis Lyon, où il décèdera à l'hôpital d'une pneumonie 4 jours plus tard. 

La guerre vécue à l’arrière

À l'arrière aussi, les correspondances rendent compte de ce contexte incertain et éprouvant et montrent que la guerre ne se limitait pas qu'au front. Dans les lettres reçues par mon arrière-arrière-grand-mère à cette époque, ses amies évoquent souvent le manque de bras pour les travaux agricoles. L’une écrit par exemple : « Ce n’est pas facile en ce moment, ils [les hommes] sont tous partis ». Les femmes devaient alors s’occuper seules des fermes et du quotidien.

On ressent aussi, au fil de ces échanges, une forme de lassitude et d’inquiétude qui s’installe peu à peu. Certaines phrases sont très parlantes, comme « Si seulement l’on arrivait à chasser ces boches », ou encore « À Basse Indre, on dit que la guerre va être longue ». Ces mots témoignent de la perte d’espoir qui gagne peu à peu l’arrière, alors que la guerre s’éternise.

Enfin, les lettres racontent parfois l’horreur telle qu’elle se manifeste loin du front. Une correspondante décrit « Ici, on ne voit que des estropiés tous les jours. Hier, l’un avait plein de trous dans la figure, l’autre n’avait plus de nez et un œil. Quelle horreur ! ». Des scènes dures, qui rappellent que même loin des combats, la guerre était omniprésente.

Les cartes postales, témoins visuels d’une époque

Au-delà des mots, les images des cartes postales racontent beaucoup de choses. Elles sont souvent décorées d’images très parlantes, qui reflètent la propagande et l’état d’esprit de l’époque. On y voit, par exemple, des soldats bien portants et souriants, destinés à rassurer les familles sur leurs conditions de vie au front.

D’autres montrent des enfants dans les bras des soldats, avec en arrière-plan des scènes de chaos, un moyen de rappeler que les hommes se battent pour protéger les générations futures. Certaines cartes jouent aussi sur le patriotisme, comme celle représentant des enfants habillés en bleu, blanc, rouge, écrivant à la craie sur un tableau « La France est notre patrie ».

Ces images, aujourd’hui un peu figées dans le temps, nous plongent directement dans le contexte de la Grande Guerre. Elles complètent les mots et donnent une dimension très concrète à cette correspondance familiale, entre l’espoir et la dure réalité. Plus d’un siècle plus tard, ces bouts de papier permettent de se replonger dans le passé et de ne pas oublier.